Cette histoire je l'avais écrite pour un concours de nouvelles. Le début était imposé et la nouvelle ne devait pas faire plus de quatre pages... Ma nouvelle n'a rien gagné mais bon, c'était quand même marrant à faire ^^ et je l'aime quand même bien xD
Au fait, si je peus vous conseiller un groupe à écouter (et si vous aimez la musique un peu dans le style de nightwish) et bien essayez "Within temptation" leur album s'appel "the unforgiving". J'adore leur première chanson ^^
Alors voilà Erret!
Erret
Louise poussa un grognement.
Elle avait retardé tant qu’elle avait pu le moment de se mettre au boulot, espérant jusqu'à la dernière minute qu’un miracle la sauverait mais là, le dernier jour, à onze heures du soir, soit neufs petites heures avant le cours fatidique, elle était coincée. D’autant plus que Mme Agay était connue pour la sévérité avec laquelle elle traitait les élèves qui ne rendaient pas leur travail dans les délais impartis.
Pour la dixième fois de la soirée et la centième depuis une semaine que Mme Agay leur avait donné ce fichu devoir, elle lut le sujet :
« Baba Yaga est une figure centrale des légendes russes. Vous utiliserez le conte étudié en classe et le résultat de vos recherches personnelles pour rédiger un texte de quatre pages dans lequel Baba Yaga jouera un rôle essentiel. »
Le conte étudié en classe ? Louise en gardait un souvenir si vague qu’elle en était venue à se demander si elle n’était pas absente le jour où la prof l’avait présenté. Vos recherches personnelles ? Il ne fallait quand même pas rigoler ! Bon, d’accord, elle n’avait rien fichu, rien écouté, rien préparé et, demain, elle allait se faire trépaner par Mme Agay. Et tout ça à cause de cette…
- Maudite Baba Yaga ! cracha-t-elle
Comme un écho à son juron, un claquement sec retentit dans le couloir, suivi du bruit d’un corps lourd se trainant vers sa chambre. Louise se figea. Si elle avait réveillé ses parents, que l’un d’eux entrait et la surprenait en train de… de ne pas travailler au lieu de dormir, Mme Agay n’aurait plus rien à massacrer demain.
Elle ce précipitait vers son lit lorsque…une femme plutôt énorme, vêtue d’une sorte de tunique sombre, une serpe à la ceinture, de longs cheveux gris, autrefois surement de jais, entra et s’avança vers Louise
- Esiuol ? Es-tu là ? Esiuol ! Lève-toi! Esiuol ! cria-t-elle.
Louise bondit et lui mit une main sur la bouche
- Vous êtes folle ? Vous voulez réveiller mes parents ou quoi ? Je ne sais pas qui vous cherchez, il n’y a personne du nom d’Esiuol ici !
- Oh, excuse-moi Esiuol, je ne voulais pas te mettre en colère ! Ne t’inquiète pas, tes parents ne nous entendront pas, ils sont pausés répliqua la femme, se dégageant de Louise, un grand sourire aux lèvres.
La réponse cinglante que Louise avait voulu lui lancer mourut sur ses lèvres, laissant place à un amoncèlement de questions :
- Ils sont quoi ? Et je m’appelle Louise, et non pas Esiuol! Et puis que se passe-t-il là ? Et qui êtes-vous ? Que faites-vous chez moi ?
- Eh ! Doucement ! Je ne peux pas répondre à toutes tes questions ! De plus, nous n’avons pas vraiment le temps, je dois te ramener à Erret, lui dit la femme.
- Où ça ? demanda Louise, un peu méfiante
- A Erret, le monde du conte, lui répondit gentiment la grosse dame.
- Et voila… J’aurais dû me douter que je rêvais… Et demain, je vais me réveiller et me rendre compte que je n’ai pas écrit ce stupide texte sur Baba Yaga, et…
Le sourire que la femme arborait disparut, et elle coupa Louise :
- Crois-tu que Baba Yaga existe, Esiuol ?
- Non, elle n’est qu’une légende !
La femme la regarda un instant, l’air de réfléchir.
- Esiuol, tu crois vraiment que tu rêves ? lui demanda-t-elle.
- Bien sûr que oui, et, d’ailleurs, il faudra que vous m’expliquiez qui est Esiuol, car moi, je m’appelle Louise !
- Esiuol est ton nom sur Erret. Là-bas, tous les noms propres sont prononcés à l’envers.
- Et… c’est quoi Erret ? hasarda Louise
- Erret ? C’est… Le reflet de la Terre, on pourrait dire ! Mais assez parlé, tu dis que tu rêves, alors peut-être voudrais-tu venir dans mon monde? proposa la femme.
- Pourquoi pas ? répondit Louise, autant s’amuser !
- Très bien, alors prends ma main, je t’emmène sur Erret ! rugit la femme avec enthousiasme.
Et elles disparurent dans un grand tourbillon bleu et vert.
Quand la brume de couleur se dissipa, Louise se trouvait dans une clairière. Elle cligna plusieurs fois des yeux, essayant d’enregistrer ce qu’elle voyait : L’endroit était étrange, mais magnifique, comme…
- On n’en trouve que dans les contes, murmura doucement Louise, embrassant du regard le paysage bleuté. Elle tourna un regard incrédule vers la femme qui l’avait conduite ici.
- Bienvenue sur Erret, Esiuol ! dit celle-ci.
- C’est… mon dieu, mais c’est tout simplement…
- Magnifique ? Magique ? Sublime ? proposa la femme.
- C’est incroyable ! dit la jeune fille émerveillée.
- Heureuse que cela te plaise, mais ce n’est malheureusement pas pareil sur le reste de cette terre.
- Comment ça ?
- Et bien… Je te l’ai déjà dit tout à l’heure, Erret est en quelques sortes le reflet de la Terre. Ici, tous les noms propres sont prononcés à l’envers, d’où ton nom, Esiuol, pour Louise. Les habitants de ce monde sont des êtres de contes, nous sommes faits des histoires que vous écrivez sur nous, là-bas, sur Terre. Malheureusement, plus personne n’écrit de contes, ou, en tout cas, pas d’aussi beaux qu’autrefois ! Alors notre monde court à sa perte !
- Est-ce pour écrire un conte que tu m’as emmenée ici ? Si c’est le cas, je tiens à te dire que je ne sais que sécher devant les feuilles blanches ! releva Louise
- Esiuol, tu as un don, caché au fond de toi, un don pour écrire, quelque chose que très peu de personnes avant toi ont eu ! Tu es unique, l’écriture coule dans tes veines ! Depuis ta naissance, ce monde a repris espoir et un peu de sa splendeur….
- J’ai du mal à le croire ! Si j’avais vraiment ce don, je n’aurais pas été debout cette nuit, devant une feuille vierge, la contredit Louise.
- Crois-moi, Abab ne se trompe jamais !
- Qui ça ? demanda Louise, interloquée.
- Abab, à l’endroit, cela fait Baba. Excuse-moi, je ne me suis pas présentée, mais je m’appelle Baba. Baba Yaga dans ton monde, Abab Agay dans le mien.
- Comme Mme Agay ? mon professeur de français ?
- Oui, malheureusement… alors, s’il-te-plait, pourrais-tu écrire ce conte ?
Baba Yaga lui indiqua une chaumière. Un crayon, une feuille, une table et une chaise l’attendaient à l’intérieur. Louise poussa un soupir à fendre l’âme, s’assit et se mit à écrire :
« Dans un pays aujourd’hui oublié, se trouvait une vieille dame du nom de Baba Yaga. Elle habitait un endroit merveilleux. Sa petite maison, à l’aspect si effrayant de l’extérieur, avec sa barrière faite d’os humains, ses serrures en dents, et sa chaumière munie de pattes de poulet, était, à l’intérieur, bien douillette et bien faite : une maison de rêve.
Laissez-moi tout de même préciser que les os et les dents ne venaient que des rares êtres humains qui s’aventuraient vers chez elle. En effet, ceux-ci se faisaient fouetter par l’orgueilleux bouleau, percer les yeux par le chat mesquin, enfermer par le portail, puis manger par ces chiens qui avaient toujours faim !
Baba Yaga avait une sœur, et celle-ci, mieux acceptée par la société qu’elle, s’était mariée avec un homme qui avait déjà une petite fille d’un premier mariage se nommant Iounna. Cette sœur était, elle, méchante, et avait comme idée de tuer sa belle-fille par n’importe quel moyen. Un jour, profitant que son mari soit au marché pour vendre du blé, la marâtre envoya la jeune fille chercher du fil et une aiguille chez sa tante Baba Yaga, croyant (et espérant) que celle-ci la mangerait suite à sa réputation d’ogresse. Quand elle arriva, Iounna fit bien gentiment la commission. Baba Yaga s’empressa de satisfaire sa nièce et décida de la garder au dîner. Malheureusement, la fillette interpréta mal les paroles, et crut que sa belle-tante voulait la manger au dîner, alors elle décida de partir. Comme elle était très intelligente, elle donna une tranche de jambon cru au chat, du pain bien tendre aux chiens, versa tout une burette sur les gonds du portail, et noua un ruban sur le bouleau. Quand Baba Yaga sortit pour proposer son bain à la petite fille, elle ne vit que le chat. Elle le prit et le caressa gentiment.
- Tu ne lui as pas crevé les yeux ? demande-t-elle surprise
- Voici longtemps que je suis à ton service, et jamais je n’ai mangé à ma faim, elle m’a nourri pour les deux jours à venir !
Baba soupira, il était vrai qu’elle n’avait pas les moyens de bien le nourrir… Elle partit voir les chiens, le portail et le bouleau, et tous les trois lui dirent que la petite leur avait donné plus qu’elle ! Baba aimait bien sa nièce, et le chemin entre les deux maisons était dangereux, alors elle sauta dans un mortier, et jouant du pilon, effaçant ses traces derrière elle à l’aide d’un balai, elle partit après sa nièce. Celle-ci, l’entendant venir, et croyant que Baba lui voulait du mal, jeta une serviette qui se changea en une large rivière. Baba lança une branche, et un pont se fit. Elle put traverser la rivière, repartant après sa nièce. Celle-ci l’entendit venir, alors elle jeta un peigne qui se changea en une immense forêt touffue. Baba Yaga prit une scie et essaya de se frayer un chemin mais elle dut vite renoncer, le bois étant trop dur et épais. Elle s’en retourna chez elle, malheureuse que même sa nièce la rejette ainsi.
Elle s’assit à sa table, le soir, et partagea son repas avec son chat, ses chiens et sa servante. Elle prit le peu d’huile qui lui restait pour cuisiner et la versa sur les gonds du portail, puis elle prit ses couvertures, les découpa et sortit décorer le bouleau de ces maigres haillons. Enfin, elle prit ce qui lui restait et s’en alla trouver une vie meilleure ailleurs. Elle trouva un autre endroit où l’herbe était violette, les troncs en bordure de la clairière se teintaient, par leurs racines qui se mêlaient à l’herbe, d’un bleu indigo, puis se dégradaient lentement vers un bleu cristal, et leurs feuilles d’or s’agitaient tendrement dans la petite brise. Tout dans cette clairière respirait la douceur et la fragilité. De petits papillons aux ailes rivalisant avec la soie se posaient délicatement sur les soleurs, les petits soleils de la clairière, comme on les appelait, à cause de leur cœur qui brillait comme un petit soleil et se reflétait sur les pétales, certaines de rubis, d’autres de jades ou bien d’azur. Personne ne voyait ces petits soleils de la même manière, leur forme changeait pour tous.
La femme devenue vieille changea de nom et se fit appeler Abab. Elle apprit que sa sœur avait été rejetée par son mari pour avoir voulu tuer Iounna, qu’elle habitait maintenant dans l’ancienne maison de Baba, et qu’elle projetait de partir sur Terre, où personne ne la connaissait. Le père et la petite vécurent, et, qui sait, peut-être vivent toujours, heureux, tout comme Baba Yaga. »
Louise posa le crayon sur la table et se relut.
- Ca va comme ça ? demanda-t-elle
- Je pense que cela ira très bien, lui sourit Abab
Louise bailla, et ses yeux commencèrent à se fermer malgré elle. Elle sentit quelque chose se glisser dans sa main et entendit vaguement la femme dire
- Ceci est pour te prouver que ce que tu as vécu n’est pas un rêve. Maintenant, je vais te ramener chez toi. Bonne nuit Esiuol !
Quand Louise se réveilla, elle mit un moment à se rappeler de ce qui s’était passé la veille. Elle regarda dans sa main : un soleur. Sa tige était faite d’émeraude, ses pétales de rubis, et son cœur était une perle rayonnante, le tout accroché sur une chaine. Sur son sac de cours se trouvait également une feuille, couverte de son écriture. Louise la relut rapidement et ne put retenir un petit cri : c’était la même histoire que celle qu’elle avait écrit dans son rêve ! Elle décida de ne pas y penser, se prépara vite et partit pour le collège.
Louise était en cours, et Mme Agay rendait les textes. Quand elle arriva devant elle, elle lui dit avec sa gentillesse habituelle :
- Louise, 5. Je vois que tu es très flémarde, ou alors tu ne sais pas lire ! Ton devoir devait faire quatre feuilles, et non pas une ! Et je trouve que tu juges la sœur de Baba Yaga beaucoup trop méchamment ! Je tiens aussi à te signaler que Baba Yaga est méchante. Et puis, d’ailleurs, cette histoire ne c’est pas passé comme ça du tout ! Je n’ai jamais voulu tuer Iounna !
Louise sourit avec indulgence et porta la main à son cou où elle avait accroché le pendentif. Elle était très pressée de revoir Abab Agay ce soir !
Fin